Les animaux sont-ils juridiquement responsables de leurs actes ? Dans Une Histoire symbolique du Moyen Âge occidental (2004), Michel Pastoureau (né en 1947) consacre un chapitre à cette question. Il explique qu'au Moyen Âge, en France, on jugeait des animaux, qui pouvaient donc être emprisonnés, condamnés à mort, mais aussi bénéficier de l'assistance juridique d'un avocat, pour divers crimes d'agression envers l'homme, de vandalisme, ou même pour avoir regimbé à la tâche (les bœufs, par exemple).
Comment des animaux peuvent-ils être sujets de droit ?
On trouve un élément de réponse à cette question dans la pensée juridique d'Épicure (vers 341-270 av. J.-C.). Ce philosophe de l'Antiquité grecque distinguait les animaux sauvages des animaux domestiques, les premiers seuls étant hors-la-loi. En effet, le droit ne pouvait selon lui relever que d'un engagement réciproque, c'est-à-dire de ce qui fait l'essence du lien social : le langage, mais aussi la réciprocité, que ce soit dans la parole ou dans l'action.
Ainsi Épicure affirmait-il l'existence d'une communication non verbale entre les hommes et les animaux domestiques de la maisonnée : chiens, chevaux, bœufs, ânes ou cochons. Selon lui, une espèce remarquable de contrat (qui n'a rien d'une promesse) obligeait les hommes à partager avec ces animaux leur toit, la nourriture produite ou trouvée, en échange de quoi ils avaient le droit, dans les limites d'une consommation frugale, de manger l'animal, de prélever son lait ou ses œufs, de s'adjoindre ses services pour se véhiculer, de garder ses troupeaux, sa maison, de moudre le grain, de tirer la charrue, etc. Dans ces conditions, le chien qui avait mordu son maître, le cochon qui avait dévoré le nourrisson de la famille, le cheval qui avait jeté son cavalier bas, devaient tous répondre juridiquement de leurs actes.
Un tel accord non verbal, les Grecs le nommaient « symbole ». En brisant en deux un morceau de poterie et en s'en partageant les morceaux, deux partenaires scellaient un accord. Dès lors que les deux morceaux de la poterie pouvaient être réunis (recollés) le contrat était rempli, l'engagement tenu – c'est la force du symbole qui faisait de l'animal domestique un sujet de droit.
Pourrait-on dès lors, aujourd'hui, revisiter la notion de symbole pour refonder un droit des animaux ?
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